MEDIAPART
La France doit protéger
Ricardo Palma Salamanca et Silvia Brzovic
·
14 juil. 2018
Dans un
tribune collective, Carmen Castillo, Olivier Duhamel, Louis Joinet, Alain
Touraine et Costa-Gavras appellent la France à protéger, en leur reconnaissant
le statut de réfugié politique, Ricardo Palma Salamanca et Silvia
Brzovic. Ayant combattu le régime sanglant de Pinochet, ils sont
aujourd'hui réclamés par le Chili en vertu
de décisions administratives et judiciaires iniques qui sont un
résidu de la dictature.
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La France est depuis 1973
une terre d’asile pour les opposants politiques au régime de Pinochet. Accueillis à bras ouverts
par Valéry Giscard d’Estaing puis François Mitterrand, particulièrement
sensibles au funeste sort réservé à ceux qui s’étaient engagés aux côtés du
Président Salvador Allende et, plus largement, aux démocrates hostiles à la
junte militaire, nombreux sont les Chiliens qui, sous leurs mandats, ont trouvé
refuge en France, s’y sont installés, y ont fondé une famille et s’y sont
construits un avenir.
Beaucoup sont immédiatement devenus français
dans l’esprit et le cœur avant d’être officiellement naturalisés. C’est
l’honneur de la France d’avoir protégé ces femmes et ces hommes dont les
parcours de vie font aujourd’hui notre fierté à tous. Nous éprouvons de
l’admiration pour tous ces jeunes adultes – pour ne pas dire ces enfants – qui
ont eu l’extraordinaire courage de résister et de combattre la dictature féroce
d’Augusto Pinochet au péril de leur vie et de leur liberté, faisant sacrifice
de leur jeunesse, de leur vie familiale et de leurs études.
Ricardo Palma Salamanca et Silvia Brzovic sont
de ceux-là. Comme tant d’autres combattants de la liberté, leur engagement
politique contre la junte militaire est né de leur refus de l’oppression faite
à leur peuple et des souffrances que ce régime leur a fait endurer. La torture
du père, d’un frère ou d’une sœur, le viol d’une autre, l’exil d’un parent
forcé par la crainte que le pire n’advienne, l’emprisonnement, le supplice, et
même l’assassinat de proches, ont empli leur âme d’adolescents de la rage qui
devait les affranchir de la peur. Animé par une telle colère, leur combat
politique ne pouvait prendre fin avec l’amorce de la transition démocratique le
11 mars 1990.
En effet, si le général Pinochet n’était plus,
officiellement, le Chef de l’État chilien à compter de cette date, le nouveau
régime restait fondé sur un texte constitutionnel adopté en 1980 sous son
autorité et qui lui confiait, en tant que Commandant en Chef des forces armées,
un rôle central au sein d’un Conseil de sécurité nationale, lui permettant
ainsi d’intervenir dans la vie politique du Chili et de maintenir son emprise
sur toutes les institutions politiques, administratives, judiciaires et
militaires du pays. Il suffit pour preuve de cette situation de se souvenir de
l’opposition farouche de toutes les autorités politiques chiliennes à
l’extradition de Pinochet en 1998, réclamé par la justice espagnole afin qu’il
rende compte de nombreux crimes commis sous son mandat. Finalement, Augusto
Pinochet, bénéficiant de la bienveillance coupable des autorités chiliennes,
est mort paisiblement au Chili sans jamais avoir été condamné ni même
simplement jugé.
A l’inverse, les résistants à son régime que
furent Ricardo Palma Salamanca et Silvia Brzovic ont été pourchassés sans
relâche pendant plus de 25 ans et jusqu’à aujourd’hui.
Comment comprendre qu’un État prétendument
démocratique puisse ainsi pendant aussi longtemps poursuivre une personne –
Silvia Brzovic – dont le seul tort est d’avoir été une opposante de gauche au
régime de Pinochet ? Comment comprendre qu’un État prétendument
démocratique puisse chercher à obtenir l’exécution d’une condamnation rendue
dans des conditions inacceptables et sur le fondement d’une législation
anti-terroriste adoptée en 1984 par un régime dictatorial ? Comment
d’ailleurs comprendre qu’une telle loi vivement critiquée par les ONG puisse y
être encore en vigueur ?
Car c’est en effet en application de cette loi
adoptée par la junte militaire pour lutter contre ses opposants politiques que
Ricardo Palma Salamanca a été arrêté en 1992 puis condamné à la réclusion
criminelle à perpétuité dans des conditions manifestement contraires au droit à
un procès équitable et après des aveux extorqués sous la torture. Cette
condamnation a été prononcée par un juge unique, Alberto Pfeiffer Richter,
membre de l’UDI, le parti d’Augusto Pinochet fondé par Jaime Guzman, au motif
notamment que Ricardo Palma Salamanca aurait participé à l’assassinat de ce
même Jaime Guzman, dont le curriculum vitae sous le régime de Pinochet est
comparable à celui de Philippe Henriot sous le régime de Vichy.
Membre fondateur, en 1970, du groupe
paramilitaire d’extrême droite Patria y Libertad, dont les crimes ont
ensanglanté le régime du Président Allende, idéologue de la junte militaire lié
à la secte nazie Colonia Dignidad, auteur de la Constitution de 1980, Jaime
Guzman était un acteur majeur de la dictature. Il faisait partie de son noyau
fasciste. Comment alors un État prétendument démocratique peut-il dresser un
mémorial à Santiago en souvenir et en l’honneur de ce sordide personnage, et
continuer à pourchasser Ricardo Palma Salamanca ?
Quand les tortionnaires de la junte militaire
ont vécu ou vivent encore paisiblement au Chili, les autorités politiques
chiliennes persistent à poursuivre les femmes et les hommes qui, comme Ricardo
Palma Salamanca et Silvia Brzovic, ont tout sacrifié pour combattre le régime
sanglant de Pinochet et réclament simplement que justice soit rendue à tous
ceux qui ont enduré les pires souffrances durant cette période. Il s’agit là
d’un résidu de la dictature auquel la France ne peut participer.
Aucune autorité française ne peut accepter de
collaborer à l’exécution de décisions administratives et judiciaires iniques,
prises à la suite de tortures et de violations graves des droits de l’Homme, ni
se compromettre en apportant son concours à la défense de la mémoire du
fasciste Jaime Guzman. Au contraire, la France doit fermement et obstinément
préserver ses principes en accueillant, comme l’y oblige sa Constitution et ses
engagements internationaux, tout Homme persécuté en raison de son action pour
la liberté.
La France doit donc protéger Ricardo Palma
Salamanca et Silvia Brzovic en leur reconnaissant, ainsi qu’à leurs enfants, le
statut de réfugié politique. C’est son honneur et c’est le droit.
Carmen Castillo
Olivier Duhamel
Louis Joinet
Alain Touraine
Costa-Gavras
Olivier Duhamel
Louis Joinet
Alain Touraine
Costa-Gavras
“Francia debe
proteger a Ricardo Palma Salamanca y Silvia Brzovic
“Desde 1973, Francia es tierra
de asilo para los opositores políticos al régimen de Pinochet. Recibidos con
los brazos abiertos por Valéry Giscard d’Estaing y luego por François
Mitterrand, ambos particularmente sensibles a la funesta suerte reservada a los
que se habían comprometido junto al Presidente Salvador Allende y más
ampliamente, a los demócratas hostiles a la junta militar, muchos fueron los
chilenos que durante sus mandatos encontraron refugio en Francia, se
establecieron, fundaron familia y se construyeron un futuro.
“Muchos se convirtieron
inmediatamente en franceses de espíritu y corazón antes de naturalizarse
oficialmente. Es un honor para Francia haber protegido a estos hombres y
mujeres cuyos caminos de vida hoy nos enorgullecen a todos. Admiramos a todos
esos jóvenes -por no decir a esos niños- que tuvieron el extraordinario coraje
de resistir y luchar contra la feroz dictadura de Augusto Pinochet, arriesgando
sus vidas y su libertad, sacrificando su juventud, su vida familiar y sus
estudios.
“Ricardo Palma Salamanca y
Silvia Brzovic son dos de ellos. Como tantos otros luchadores por la libertad,
su compromiso político en contra de la junta militar nació del rechazo de la
opresión a su pueblo y del sufrimiento que este régimen les ha causado. La
tortura de un padre, de un hermano o de una hermana, la violación de otro, el
exilio de un pariente forzado por el temor de que ocurriera lo peor, el
encarcelamiento, la tortura e incluso el asesinato, llenaron sus almas de
adolescentes con la rabia que los liberaría del miedo. Animados por tal ira, su
lucha política no pudo terminar con el inicio de la transición democrática el
11 de marzo de 1990.
“Si bien el General Pinochet
ya no era oficialmente el Jefe de Estado chileno a partir de esa fecha, el
nuevo régimen permaneció basado en un texto constitucional adoptado en 1980
bajo su autoridad que le confió, como Comandante en Jefe de las Fuerzas
Armadas, un papel central en el Consejo de Seguridad Nacional, lo que le
permitió intervenir en la vida política de Chile y mantener el control sobre
todas las instituciones políticas, administrativas, judiciales y militares del
país. Como prueba de esta situación, basta recordar la feroz oposición de todas
las autoridades políticas chilenas a la extradición de Pinochet en 1998,
exigida por los tribunales españoles para que rindiera cuentas por muchos de
los crímenes cometidos bajo su mandato. Finalmente, Augusto Pinochet,
beneficiado por la benevolencia culpable de las autoridades chilenas, murió
tranquilamente en Chile sin haber sido condenado y ni siquiera juzgado.
“Por el contrario, los que se
resistieron a su régimen, Ricardo Palma Salamanca y Silvia Brzovic, han sido
perseguidos implacablemente durante más de 25 años y hasta la fecha de hoy.
¿Cómo es posible que un Estado supuestamente democrático haya requiera a una persona -Silvia Brzovic- durante tanto tiempo, cuyo único delito es haber sido una opositora de izquierda al régimen de Pinochet? ¿Cómo puede entenderse que un Estado supuestamente democrático pueda solicitar la ejecución de una sentencia dictada en condiciones inaceptables y sobre la base de la legislación antiterrorista adoptada en 1984 por un régimen dictatorial? Además, ¿cómo podemos entender que tal ley, que ha sido duramente criticada por las ONG, pueda seguir aún en vigor? Ricardo Palma Salamanca fue detenido en 1992 y condenado a cadena perpetua en condiciones claramente contrarias al derecho a un juicio justo y tras confesiones obtenidas bajo tortura, en aplicación de la ley adoptada por la junta militar para luchar contra sus opositores políticos. Esta sentencia fue pronunciada por un juez único, Alberto Pfeiffer Richter, miembro de la UDI, partido de Augusto Pinochet fundado por Jaime Guzmán, sobre la base, de que Ricardo Palma Salamanca participó en el asesinato del mismo Jaime Guzmán, cuyo curriculum vitae bajo el régimen de Pinochet es comparable al de Philippe Henriot (Colaborador Nazi) bajo el régimen de Vichy.
¿Cómo es posible que un Estado supuestamente democrático haya requiera a una persona -Silvia Brzovic- durante tanto tiempo, cuyo único delito es haber sido una opositora de izquierda al régimen de Pinochet? ¿Cómo puede entenderse que un Estado supuestamente democrático pueda solicitar la ejecución de una sentencia dictada en condiciones inaceptables y sobre la base de la legislación antiterrorista adoptada en 1984 por un régimen dictatorial? Además, ¿cómo podemos entender que tal ley, que ha sido duramente criticada por las ONG, pueda seguir aún en vigor? Ricardo Palma Salamanca fue detenido en 1992 y condenado a cadena perpetua en condiciones claramente contrarias al derecho a un juicio justo y tras confesiones obtenidas bajo tortura, en aplicación de la ley adoptada por la junta militar para luchar contra sus opositores políticos. Esta sentencia fue pronunciada por un juez único, Alberto Pfeiffer Richter, miembro de la UDI, partido de Augusto Pinochet fundado por Jaime Guzmán, sobre la base, de que Ricardo Palma Salamanca participó en el asesinato del mismo Jaime Guzmán, cuyo curriculum vitae bajo el régimen de Pinochet es comparable al de Philippe Henriot (Colaborador Nazi) bajo el régimen de Vichy.
“Jaime Guzmán fue miembro
fundador, en 1970, del grupo paramilitar de extrema derecha Patria y Libertad,
cuyos crímenes ensangrentaron al régimen del Presidente Allende, ideólogo de la
junta militar vinculada a la secta nazi Colonia Dignidad y autor de la Constitución
de 1980. Jaime Guzmán fue actor protagonista de la dictadura. Hacía parte de su
núcleo fascista ¿Cómo puede entonces un Estado supuestamente democrático erigir
un monumento en Santiago en memoria y honor de este sórdido personaje, y seguir
persiguiendo a Ricardo Palma Salamanca?
“Mientras los torturadores de
la junta militar vivían o viven pacíficamente en Chile, las autoridades
políticas chilenas persisten en perseguir a mujeres y hombres que, como Ricardo
Palma Salamanca y Silvia Brzovic, sacrificaron todo por luchar contra el
sangriento régimen de Pinochet y piden simplemente justicia para todos los que
sufrieron durante este período. Se trata de un residuo de la dictadura en el
cual Francia no puede participar. Ninguna autoridad francesa puede aceptar
colaborar en la ejecución de decisiones administrativas y judiciales inicuas,
adoptadas a partir de torturas y graves violaciones de los derechos humanos, ni
comprometerse a aportar su contribución a la defensa de la memoria del fascista
Jaime Guzmán.
“Por el contrario, Francia
debe firmemente y obstinadamente preservar sus principios acogiendo, como le
obliga su Constitución y sus compromisos internacionales, a todo hombre
perseguido por su acción en pos de la libertad. Por lo tanto, Francia debe proteger
a Ricardo Palma Salamanca y Silvia Brzovic concediéndoles a ellos y a sus hijos
el estatuto de refugiados políticos. Es su honor y obligación”.
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PETITION A SIGNER